mercredi 21 septembre 2011

Les limites du pyjama en papier

SUICIDES
Un nouveau détenu a mis fin à ses jours à l’aide de son kit anti-suicide… cherchez l’erreur.  Outre la question du suicide en prison, ce fait dramatique – le jeune homme avait 23 ans - pose la question de la nature des réponses apportées aux problèmes soulevés.

En 2009, la Garde des Sceaux, Michèle Alliot-Marie avait avancé des mesures pour parer à la multiplication des suicides. Une série de suicides relayée par la presse avait en effet suscité l’émoi.

D’une part, des kits anti-suicide (sic) seraient distribués, lors des moments les plus difficiles comme un passage au mitard, aux individus susceptibles de mettre fin à leurs jours. Si le taux de suicide est sept fois plus élevé en prison qu’à l’extérieur, il est également beaucoup plus élevé en quartier disciplinaire qu’en cellule ordinaire. Ces kits comprennent notamment un matelas anti-feu, des draps indéchirables et un pyjama en papier à usage unique. D’autre part, des pièces spécialement aménagées et dépourvues de points d’arrimages tels que des barreaux aux fenêtres ou un support mural pour une télévision, seront généralisées afin d’empêcher le passage à l’acte. Enfin, il était annoncé que les détenus en quartier disciplinaire auraient désormais accès au téléphone et à la radio.


Outre ce volet « matériel », la Garde des Sceaux prévoyait de développer une «grille d'évaluation du potentiel suicidaire» de chaque détenu, ainsi qu’une formation plus poussée des gardiens afin qu’ils sachent détecter et accompagner les prisonniers à risque.

Enfin, le ministre de la Justice proposait que les individus jugés les plus fragiles soient accompagnés par des "codétenus de soutien"sur la base du volontariat. L'idée est testée dans trois prisons. Une trentaine de codétenus sont déjà formés.

Toutes ces mesures, sont, en soi, plutôt positives; mais limitées, comme le montre les failles du « pyjama » anti-suicide. Une personne qui veut se suicider trouvera toujours le moyen pour le faire, quitte à s’ouvrir les veines avec les dents. Il convient d’agir sur sa volonté d’en finir, plutôt que sur les moyens à sa disposition pour y parvenir.

Là encore, la volonté du gouvernement d’agir se heurte aux contradictions de sa politique. Car dans un même temps, il distribue des pyjamas en papier et construit de nouvelles prisons, certes propres, mais à l’atmosphère glacial, où le détenu ne s’adresse plus au maton posté derrière sa porte, mais à un interphone parfaitement désincarné.  
« Les nouvelles prisons substituent les technologies dernier cri aux interventions des surveillants, soulignait en novembre 2009 le pasteur Brice Deymié, aumônier national des prisons dans les colonnes de La Croix. Les portes s'ouvrent à distance, les dispositifs signalétiques se multiplient au point que les détenus se perdent dans les méandres de couloirs, les surveillants sont postés derrière des vitres en verre fumé sans qu'on puisse les voir.» L’aumônier allait très loin dans sa critique de ces établissements nouvelle génération puisqu’il affirmait même que nombre de détenus souhaitaient revenir dans leurs anciennes prisons, insalubres… mais plus humaines. 

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